Vivre ses émotions, un chemin

Rassurez-vous, je ne vous ferai pas un cours de biologie marine - ce dont je serais incapable - juste un petit condensé d'informations mêlé à quelques réflexions simples. Tout est parti de mon fils qui a décidé de nous faire visiter The Deep (L'aquarium profond) à Hull, en dessous de Scarborought. Cet aquarium a la particularité d'être creusé sur plusieurs étages à descendre puis à remonter. Dans ce lieu vivant et coloré, aquatique et minéral, j'ai pu observer, entre autres - parmi les gros poissons - près de 15 espèces de requins et de raies différentes. Ils ondulent et se propulsent rapidement grâce à leur nageoire caudale forte et imposante, tandis que leur œil, toujours aux aguets, et leur bouche en forme de fente, large et robuste, nous impressionnent. Vous savez certainement que la plupart d'entre eux sont contraints à nager en permanence pour pouvoir respirer, en faisant passer l'eau à travers leur gueule et leurs branchies.

Bon, sur le coup, je ne me suis pas attardée plus que nécessaire... Juste le temps de souffler à ma petite-fille de 2 ans le nom de la grosse bête : "The sharke" et de la regarder tourner et virevolter trois ou quatre fois.

Mais, en sortant, mes yeux ont tout de suite été attirés par les reflets du bronze entre ciel mouvementé et dune. Quel bel animal fuselé, dans sa posture souple et dynamique ! Quel seigneur des océans, posé immobile sur ce rocher, à la vue de tous !

Photos : Cathie Flore (Eh, eh, on voit ma petite-fille !)

Bien sûr, il n'y a pas de cette espèce de requins en Mer du Nord, la sculpture étant placé là pour donner envie d'aller visiter l'aquarium, ou pour (dans mon cas) susciter le désir de mieux connaître ce mammifère, qui n'a pas toujours bonne presse dans l'esprit des personnes peu informées. Pourtant, il paraît qu'il existe beaucoup plus de chances de gagner à la Loterie Nationale que de se faire agresser par un requin, mais oui !

Pour faire relativement court, le requin gris de récif se révèle un animal très intéressant, car il va se nourrir en haute mer et redistribue le riche azote de ses défections sur les récifs coralliens, qui en ont besoin pour vivre. Je m'en tiendrai là, mais il joue aussi un rôle d'équilibre dans les fonds marins, aussi bien pour la faune que pour la flore.

Et pourtant, ce requin est quasiment menacé par la surpêche, dans les eaux de Polynésie française, dans les Maldives, au Soudan ainsi qu’aux Philippines et aux abords de l’Australie. Ceci est dû à l'appétit humain grandissant pour ses ailerons et pour sa chair.

Vous me direz peut-être qu'avec les guerres, les difficultés énormes des migrants, les fins de mois à boucler et les impôts toujours trop lourds, le sort des requins, "on s'en balance". Oui, mais non, car il faut le dire et le répéter "tout est lié" et la destruction, même lente, d'une espèce amène des déséquilibres qui entraînent d'autres destructions jusqu'à porter atteinte à la vie humaine.

Finalement, ce requin gris de récif, que je n'irai jamais chatouiller à 35 ou 60 mètres de profondeur, je me surprends à le trouver beau avec son dos gris, son ventre blanc et les bords internes de ses nageoires liserés de noir. La vie, n'est-ce pas aller d'émerveillements en émerveillements ? Pour un grain de sable, des nuages, un enfant, un requin ?

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Ré et Philippe Soupault, dans leurs "Contes des cinq continents", racontent avec " Voyage au fond de la mer" une édifiante histoire où des baleines sont dérangées par un groupe d'humains dans une barque qui ont lancé une grosse pierre en guise d'ancre. A plusieurs reprises, elles envoient leurs esclaves, des requins, comme messagers pour demander aux humains de quitter les lieux, mais ceux-ci n'en font rien et arrachent même les ailerons des requins. La baleine monte alors elle-même à la surface de l'eau et fait descendre la barque avec les humains chez elle. Là, elle organise une fête et leur donne des manteaux à mettre sur eux. Une fois remontés des profondeurs, les humains découvrent que leur corps est recouvert de varechs et d'algues qu'il leur est impossible d'arracher. Et dans leur village, personne ne les reconnaît. Certains leur disent qu'il y a déjà deux ans qu'ils ont disparu et qu'ils ne peuvent qu'être morts.