Voir un rosier pousser
Rose « Abbaye de Cluny
Sa robe est-elle saumon abricot
Peu importe car elle est ma rose
Celle qui pousse sur le rosier devant
Depuis maintenant plus de quinze ans
Abbaye de Cluny elle se nomme
Avec elle j'ai des conversations
Elle me chuchote la grâce de l'instant
Et la douceur de l'éternité
Cathie Flore, mai 22
Dans le jardin, devant la maison, j'ai un rosier, longuement choisi dans une jardinerie, il y a plus de dix-huit ans. C'est la couleur qui avait fait la différence, un orangé, doux et flamboyant, un peu saumon, un peu abricot. J'aimais aussi son nom "Abbaye de Cluny", qui évoquait la prestigieuse enceinte du Moyen-Age, avec cloitre baigné de lumière et d'ombre, allées finement ratissées et vieux jardiniers amoureux, pétris de silence, de chants grégoriens et d'attention aux moindres petits sursauts de Dame Nature au jardin...
En théorie et sur les catalogues, c'était vraiment un merveilleux petit rosier buissonnant à grosses fleurs, original, moderne et romantique à la fois. Mifasol avait creusé la terre à un emplacement exposé à l'est et le soleil, la pluie avaient fait leur travail.
Au premier printemps, deux ou trois roses ont éclos, au parfum très suave et aux pétales délicatement ordonnés. Ravie, je devins plus attentive aux roses en général, découvrant qu'il en existait aux formes, couleurs et senteurs innombrables. Je m'approchais davantage, lors de mes sorties, pour en humer le parfum, et m'attardais à admirer les courbures et le galbe des pétales.
Ensuite est venu, trop tôt, le temps de la déception !... Le rosier ne se développait pas et n'offrait à chaque printemps, qu'une ou deux roses, toujours très parfumées, il est vrai, mais trop vite flétries. Mauvaise terre, pensions-nous tous les deux ! Effectivement notre coin est très argileux. Aussi nous avons fait des apports de terreau et de sable. Pourtant, d'année en année, la déception persistait !...
Un jour, Mifasol a constaté qu'un laurier-tin se tenait un peu trop proche du rosier. C'était peut-être lui qui le gênait dans son développement... Alors l'homme a arraché le laurier-tin.
Après un long hiver, la douceur est enfin revenu au jardin. "Abbaye de Cluny" se portait beaucoup mieux. Des magnifiques roses déployaient leur pétales et distillaient leur parfum à ceux qui passaient là. Joie, émotion !
Pourtant au fil des années, force m'a été de constater que ce rosier est certes beau, mais qu'il ne donne guère plus que deux ou trois fleurs à la fois. Pourquoi si peu de générosité ?
Sans penser à cela, hier, nous sommes allés à une grande fête des roses sur le site troglodytique de Doué-en-Anjou. Joie de voir qu'"Abbaye de Cluny" était exposée dans les caves, non loin de "Léo Ferré", "Catherine Laborde", "Parfum Royal" ou encore "Jubilé Prince de Monaco".
Discutant avec un rosiériste, celui-ci nous expliqua qu'enfant il voyait ses parents disposer au pied des rosiers des peaux de bananes, du marc de café... "Les gens aujourd'hui mettent de l'engrais, mais sans doser et ça les brûle... On peut aussi mettre du fumier décomposé, renseignez-vous dans les jardineries."
Je sens que je vais désormais davantage prendre soin de celles que j'aime. Particulièrement, mieux les nourrir.
C'est le temps que tu passes pour ta rose,
qui fait ta rose importante.Antoine de St Exupéry, "Le petit Prince"
Commentaires
certainement c'est très difficile de faire pousser un rosier, il y en a tant, celui qui nous plait n'est pas forcément celui qui convient au sol et à l'endroit désigné, les vieux trucs demandaient beaucoup de temps et beaucoup de petits attentions... avec le temps cela peut s'arranger ?
On n'est jamais sûr de réussir mais parfois, le destin s'en mêle.. on m'a offert il y a quelque temps, un petit rosier dans un pot .. Je l'ai planté et maintenant, il grossit et m'offre de si belles fleurs.
Moi aussi, je mets de l'ail et des peaux de banane coupées en petits morceaux au pied et je pulvérise du purin d'ortie que je confectionne sur les feuilles..
Même si rare, cette rose a une magnifique couleur!
Un peu couleur chair. elle change des roses rouges. Il faut du temps et de l'observation pour qu'elle puisse s'épanouir pleinement. J'aime bien ce récit qui s'apparente à une histoire d'amour ou d'amitié où il convient de se laisser transformer par l'autre.
j'aime beaucoup la couleur. on dit ici qu'il faut leur mettre du crottin de cheval.. Elles sont précieuses et vous font languir.. toujours beaucoup d'élégance dans vos articles
Bravo pour ton attention à tes roses ! Dans mon jardin il y a de nombreux rosiers qui étaient déjà là avant mon arrivée. Ils ne donnent jamais beaucoup de fleurs et parfois s'arrêtent complètement. Au début je dégageais bien les pieds et mettais de l'engrais et du terreau, mais maintenant je n'y arrive plus et ça ne change pas grand-chose... Cependant il y aurait sûrement à faire car mon voisin d'en face lui, a des rosiers resplendissants en toute saison. Les siens sont plantés dans des plates-bandes et il a le tuyau d'arrosage juste à côté pour les arroser régulièrement, ce qui n'est pas mon cas...
Une très jolie rose et parfumée. Merci pour son histoire.
En plus j'aime beaucoup la ville de Cluny et sa campagne. Bises
Un rosier c'est vivant. Il a ses besoins, ses goûts, ses préférences. J'aime ce déroulement de votre apprivoisement dans le temps. Prendre soin, c'est essentiel !
J'adore les roses. J'en ai plein mon jardin. Je leur mets au pied du marc de café et cela semble leur convenir !
Billet plein de sensibilité : textes et photos. J'aime les histoires bien racontées. Et celle-ci est pleine de sens : observer, être attentif, nourrir... que de belles attitudes à avoir vis-à-vis de ce qui nous entoure : plantes, animaux, humains.
les fleurs me reposent