La mort, cette inconnue qui fait peur
Tous, à un moment ou à un autre, nous y sommes confrontés. De façon tragique, ou un peu plus "douce" lorsqu'il s'agit d'un être très âgé qui s'en va.

Cimetière médiéval de Whitby (R-U) face à la mer du Nord
La mort, parce qu'elle est séparation d'avec ceux que nous aimons, séparation d'avec les paysages que nous admirons, des lieux que nous chérissons, et parce qu'elle est à la fois inéluctable et sans retour, nous fait peur. A cela s'ajoutent les circonstances de son intrusion dans nos vies et le degré de souffrance que nous aurons peut-être à supporter sur un temps plus ou moins long. Pour certain(e)s, c'est l'avant de l'heure fatidique qui inquiète beaucoup ; pour d'autres, c'est plutôt l'après, avec la crainte d'un jugement et la hantise de l'éternité. A chacun son anxiété !
Face aux différents scénaris, des personnes choisissent de n'avoir aucun moment de vacuité dans leurs journées afin d'éloigner les questions fâcheuses sur le sujet, d'autres y pensent tous les jours avec des moments d'effarement, d'autres encore affirment que de se rendre utiles auprès leurs petits-enfants, de populations dans le besoin, ou d'une association dont l'action leur tient à coeur, leur permet de transformer leurs peurs en espèrance d'un monde meilleur.
La foi chrétienne incite à la confiance et à l'amour, particulièrement des plus petits, pour aider au passage. La psychologie, elle, a tendance à dire que puisque la mort fait partie du cycle de la vie, il est important d'y penser, de voir quelles émotions cela réveille en nous et de les accueillir en profondeur. Puis concrètement de se détacher régulièrement de ce à quoi nous nous accrochons avec excès. Par exemple, des jouets d'enfant, de vieilles revues, éventuellement des collections, des bibelots, des lettres... pour ce qui est des objets. Mais aussi des pensées encombrantes, telles la rancune, la trop grande rigueur, les regrets stériles ou la jalousie. Tout cela progresse au pas à pas, pour celui ou celle qui le souhaite réellement et au besoin se fait aider.
Pour ma part, le désencombrement n'est pas une attitude simple, mais je l'ai entamé depuis déjà plusieurs années, pour les émotions, comme pour les objets. C'est un chantier toujours "en cours".
En ce qui concerne les séparations plus profondes avec les êtres chers, avec la terre, les oiseaux, les arbres, la lune, les montagnes et même les chats ou les chiens, c'est évidemment plus délicat à aborder. Parfois, lorsque je vis un moment assez intense - quoique simple- d'amitié, de fraternité, d'admiration de la nature, d'amour ou de création, je me dis "Quelle chance de vivre cela ! La mort ne pourra pas me l'enlever !" ou alors : "Devant de si belles et bonnes choses, moi, j'ai envie de vivre !!!" Et cette envie repousse la mort, ou la met à sa juste place, qui est l'abandon, un jour, de notre corps, mais pas de tous nos élans intérieurs.
Je crois, finalement, que ce qui fait peur dans la mort, c'est qu'elle est peut-être un miroir grossissant de ce qui ne nous plait pas dans nos vies concrètes, ici et maintenant. Peur d'un jugement (mais c'est moi-même qui me juge), peur de l'ennui, après (mais ne suis-je pas dedans, en ce moment ?), peur de la froideur, du manque de joie, de liberté (est-ce que ça ne dirait pas de mon quotidien le plus quotidien ?...).
Humaine parmi d'autres, aimant réfléchir, sans trop céder aux "passions ambiantes", je ne concluerai pas cet article, mais je serai heureuse de provoquer un échange, en toute liberté.

Commentaires
je n'ai pas peur de ce changement d'état. C'est plus la perte d'autonomie que je crains et la difficulté à choisir le moment de ma mort en France.. Je parle souvent de mon départ aux petits qui ont fini par l'associer à la suite logique de la vie. Ma fille veut me mettre dans son jardin et la petite de dire: " pas dans un endroit où je vais souvent car je vais pleurer tous les jours " et en visitant le cimetière: " tu seras bien, là, mamiefofolle, toi qui aimes le silence". je ne me pose pas de question, c'est ainsi.
j'ai surtout peur de la mort de proches. j'y ai été confrontée si souvent, l'absence , ce vide permanent qui vous remplit.. je n'ai pas la foi, aussi, pas d'espérance de ce côté là et comme le dit Brigitte, moi aussi, la déchéance me fait peur.. alors, partir vite sans imposer aux autres son vieillissement serait une solution qui me plairait bien..
la sienne elle est inéluctable ... alors j'essaie d'apprivoiser l'idée, mais les proches ! c'est plus que difficile, même si ils accompagnent en pensée... ne chantez pas la mort : Léo Ferré nous l'a mis en musique...
@ broutileb : Merci de ton partage. La petite manifeste son affection à travers ses mots touchants.
@ Sedna : Je peux comprendre ta peur et ton désir. La mort des proches est une épreuve marquante.
@ thé âche : Apprivoiser est un terme bien approprié, quand on peut le vivre avec encore toute sa lucidité. Je vais aller écouter Ferré qui a certainement des mots bien différents de Brel...
La mort, on y pense lorsqu'on va à un enterrement. Lorsque la personne est jeune, c'est difficile à admettre, comme une injustice. Et faire son deuil est parfois long. Mais l'idée qu'il y a peut-être des retrouvailles (je l'espère !) atténue la peine, avec le temps.
Cette semaine j'ai écouté une interview de Stéphane Alix qui expliquait sa vision de la mort :" le soir vous vous endormez, puis il ne se passe rien, et soudain vous retrouvez les couleurs, les textures, les détails de la vie, les paroles amies et tout un monde. C'est le moment du rêve. Eh bien la mort c'est pareil, vous vous endormirez et soudain vous serez ailleurs". Cette explication simpliste a fini par me redonner le moral ! Sinon je passe mon temps à me demander ce que je regretterai quand je serai morte !!
La mort est un mystère qui fait partie de la vie. On peut s'y préparer en aimant tout ce qui est vivant et en se tenant prêt, autant que possible. C'est-à-dire en se réconciliant avec ceux avec qui on est brouillés et en essayant de "réparer" nos méfaits ou nos manques. Le reste ne nous appartient plus.
Fin novembre 2009, j'ai eu la plus grande tristesse de ma vie, mon frère mourait, nous étions très proches, il était mon grand frère protecteur. Mais curieusement, en le regardant sur son lit de mort, le visage apaisé, je me disais : si lui est parti, alors ce ne doit pas être si terrible que cela de partir, et la mort ne me faisait pas peur, je me disais que je rejoindrais mes parents, mon frère, et toutes les personnes qui m'étaient chères. Depuis, j'ai perdu d'autres êtres chers, et je pense pareil, même si la mort m'effraie comme beaucoup de personnes.
Sinon, j'aime beaucoup ton article, Cathie, et ce que tu dis, je m'y retrouve entièrement, comme dans beaucoup de tes écrits, c'est une chance d'être "tombée" chez toi et de pouvoir te lire. Merci.
Bonne fin de journée.
@ Coline : Oui, la mort des enfants ou des jeunes est difficile à admettre. Elle nous interroge et nous laisse souvent démunis. Quant aux retrouvailles, je crois qu'elles s'amorcent de notre vivant, dans le lien qu'on entretient avec les personnes.
@ Phrasie :"retrouver les couleurs, les textures, les détails de la vie, les paroles amies..." Peut-être, mais comment, je ne sais. Est-ce l'amour qui permet cela ? J'ose l’espérer.
@ Maria : Se "tenir prêt", se réconcilier, réparer ce qui est possible... un beau programme. Peut-être faut-il "tendre vers" sans perfectionnisme et sans se décourager. Merci de tes mots.
@ Françoise : Tes confidences me touchent. Il m'est arrivé de me dire la même chose : d'autres l'ont vécu avant moi, donc le chemin est ouvert. Pourtant chaque personne est différente. Ma grand-mère qui appréhendait beaucoup la mort (malgré sa foi vive) est partie dans la paix. Merci de ta gentillesse et de tes mots qui me confortent dans l'écriture. Je ne sais ni chanter, ni danser, mais écrire, j'aime ça. Bon après-midi !
Pour moi la mort n'est plus une inconnue quand la chair de ma chair l'a mise sur mon chemin, la vie devient alors une survie qu'il faut ménager pour ne pas mourir à mon tour et continuer d'honorer la vie et rester près de ceux que j'aime ; il sera toujours temps de l'accueillir quoiqu'il advienne ! et sans peur ! Il ne faut pas hésiter de parler de la mort, étape incontournable de la vie de chacun mais savoir être présent lorsqu'elle frappe au mauvais moment.
Bien que croyant à une autre vie après la mort, ce passage me fait peur au fur et à mesure que je m'en rapproche. J'aime la vie et plus je vieillis elle m'est précieuse. je trouve que tu as écrit un beau texte sur ce sujet délicat.
Que dire sur la mort, personne n'en est revenu vraiment, on peut broder mais c'est un sujet difficile, perdre un être cher c'est toujours une grande épreuve en tout cas...
Plus le temps passe et plus on s'en rapproche et malgré tout on aime la vie !
Je ne parle pas de ceux dont la présence me manque tant auiourd'hui, ils seront toujours en nous
@ Monique : Merci pour ton commentaire sensible. Il faut continuer d'honorer la vie, comme tu le dis fort bien. Tout en parlant de la mort de façon la plus apaisée possible. Elle frappe à l'improviste, parfois, et d'autres fois prévient quelques mois à l'avance, comme cela a été le cas pour ma maman.
@ Daniel : Ton commentaire est très juste. La vie est précieuse et l'aimer doit rendre plus belle celle d'après. Merci pour ton appréciation.
@ marine D : Aimer la vie est peut-être la meilleure manière d'approcher la mort... Oui, nos êtres chers sont "présents" dans la mémoire du cœur, ils donnent de la force.