Murs ici et là
Lily se souvient de ce matin du treize août 1961.
Les bruits de la radio l'ont sortie de ses rêves. Tout de suite elle a senti quelque chose d'anormal et de grave. Les voix sinistres, venant pourtant de loin, emplirent un moment sa tête. Elle questionna alors autour d'elle. Un mur avec des barbelés avait été construit dans la nuit, à Berlin. Cela lui parlait un peu, car une grand-mère qu'elle n'avait jamais connue (la première femme de son grand-père) était née là-bas. Son Pépé était consterné et répéta plusieurs fois : "Pourvu que ça ne nous amène pas la guerre. Ce serait terrible !" Sa Mémé parlait beaucoup avec sa sœur venue exprès pour cela et Lily, trop jeune pour comprendre, absorbait leur lourde inquiétude. Une partie de la journée s'écoula, sinistre, avec une vague peur au ventre.
Fillette à patin à roulettes devant le mur de Berlin 1965
Cette petite fille avec sa robe sage, son ruban dans les cheveux et ses mains dans les poches, à quoi pense-telle en patinant ainsi, si près du mur que l'on dit "de la honte" ?
Certainement a-t-elle absorbé, elle aussi, l'inquiétude de son entourage, mais ne sait pas faire le tri de ce qu'elle entend et voit autour d'elle. Elle a besoin d'aller au plus près de ce fameux mur, certainement pour tenter de l'apprivoiser un peu.
Son visage reflète un mélange de calme et de tristesse … Et pourtant, elle patine ! Elle patine comme tous les gosses qui, au plus sombre de l'Histoire des grands, continuent de traquer un peu d'espace et de liberté pour rêver et s'amuser.
Vingt ans après la chute de ce mur, d'Ouest en Est, du Nord au Sud, d'autres murs ne cessent de s'ériger. On en parle moins, car ils sont loin, mais ne sont-ils pas plus choquants encore, au petit matin de notre vingt-et-unième siècle que l'on voudrait de la mondialisation, mais surtout de la Paix ?!
Plus menaçantes encore - parce que plus largement répandues - sont les nouvelles fractures qui séparent plus injustement que jamais les riches et les pauvres, et cela jusqu'au cœur des pays riches.
Jean-Claude Guillebaud, journaliste.
Pouvons-nous rester bras croisés, indifférents, sourds et muets ?
A travers l'éducation, pouvons-nous agir à la racine de ce qui pousse les individus à se rejeter les uns les autres ?
Commentaires
Sujet d'actualité. Impensable ce mur de Berlin. J'ai un ami qui à la chute du mur a pu retrouver toute sa famille qu'il n'avait pratiquement pas connu à cause de ce terrible mur. En ce moment je regarde à la télé des documentaires sur ce sujet, et on s'en pose des questions et il est bien difficile de répondre à ces interrogations.
Que le monde est dur et bête.
Bisous et bon dimanche.
Lorsqu'en 1965 cette petite fille faisait du patin à roulettes, j'ai passé 3 jours de l'autre coté de ce mur, en tant que militaire...je fus controlé et photographié par les vopos 3 fois, à check point Charlie, mais j'avais un laisser passer du haut commandemant des forces françaises en Allemagne, signé du général de Lassius de Saint Genies...sacré époque, oui, la porte de Brandebourg était pleine de chevaux de frise en barbelés, et je me souviens de quelques rares brabans...
c'est bien que ce mur soit tombé...
bise lily, bon dimanche...
Je ne me souviens pas de la construction du mur : je n'avais que 2 ans. La fillette semble préoccupée. Un morceau d'histoire triste avec des familles séparées. L'enfermement est toujours un traumatisme. Quel bonheur lors de sa chute en 89. Je m'en souviens : j'en avais des frissons et les larmes aux yeux.
D'autres murs existent invisibles à l'œil ceux-là mais tout aussi tenaces. Ces murs sont érigés dans le cerveau des humains et occasionnent bien des dégâts. Guillebaud a tellement raison ! Quand ferons-nous tomber ces murs ?
Bon weekend Lily
Je n'étais pas née quand le Mur fut construit... Je me souviens de 89... Une amie m'avait même apporté un mini bout du mur... Je l'ai gardé longtemps puis j'ai dû l'avoir perdu...
Ce Mur de la honte existe encore oui, pas forcément en Allemagne, mais dans le monde, entre le nord et le sud, entre les blancs et les noirs... Et c'est une honte oui, qu'à l'aube de 2010 nous, les Hommes, n'ayons pas surpassé cela.
Nous avons un devoir envers les générations futures... Expliquer, raconter, afin qu'à l'aube du prochain millénaire, tout cela n'existe plus... Oui, je sais c'est long, c'est loin, mais le travail à faire est long aussi...
Bonne fin de dimanche Lily belle
J'étais à Berlin en décembre 1989 avec ma classe de seconde 9 et mon prof d'éco de mon lycée lorrain. Quelques semaines après la chute donc. J'ai vu les centaines de morceaux de mur vendus étalés par-terre sur des draps blancs, j'ai vu les militaires "déchus" vendre leur "panoplie", leur insigne.
"Es ist für eine Meinungsforschung ..." Nous interrogions les passants pour un sondage d'opinion et leur offrions des tablettes de chocolat, du café ou du dentifrice en échange de leur attention ... Ils avaient encore peur de s'exprimer librement mais ils acceptaient tous de nous accorder un moment. À l'Est je me souviens qu'il y avait un employé, dont le "métier" était d'appuyer sur le bouton de l'étage désiré ... dans chaque ascenseur commercial ou administratif, il y avait des marchands de glace un peu partout alors que c'était l'automne. Beaucoup d'Allemands de l'Est ont perdu leur emploi suite à la chute du mur, beaucoup d'Allemands de l'Est ont souffert de l'arrogance des Allemands de l'Ouest à leur égard ... Des familles se sont retrouvées, recomposées, mais je me souviens que beaucoup d' ex- Allemands de l'Est regrettaient déjà le "bon temps " du plein-emploi, l'entraide avant la chute ... Ils étaient écœurés par le gaspillage, la profusion à l'Ouest. Les richesses qu'ils ne pouvaient s'offrir.
Les changements même heureux, même de la dictature communiste à la démocratie capitaliste, ne sont font jamais sans souffrances nouvelles.
C'était juste pour rappeler qu'après la liesse du 9 novembre, il y a la désillusion, la pauvreté ...
J'aurais tant à dire, et il se fait tard...Je reviendrai, et je prendrai mon temps!
Je peux dire ce soir que j'aime les commentaires qui t'ont été déposés...et que même avec un gros téléscope, on ne voit pas les solutions!
Bonne soirée, Lily!...et merci d'avoir publié sur ce sujet!
Le mur est à la mode. J'aimerais bien qu'on les supprimât tous. Après, on jouera avec les morceaux.
J'avais 15 ans quand le mur est tombé...
Et mon petit dernier est exactement né 14 ans après...
Avançons prudemment mais sûrement en tenant compte des leçons de l'Histoire...
;-)
Bisouuuuuuuuuus
^^