Parler à un cheval
Avec Yaya* nous allons, parfois, voir les chevaux. Lorsque, dans leur enclos, ils avancent la tête au-dessus (ou au-dessous) de la barrière, elle tend illico les bras vers sa môman en poussant de petits gémissements. Mais une étreinte, trois mots, et elle regarde à nouveau - cette fois-ci de haut - ces étranges animaux à l'encolure mobile et à la gueule si impressionnante qu'on croirait qu'elle est faite pour donner des coups de battoir aux petits z'enfants ou pour leur ratatiner le crâne.
Le jour de Pâques, ce bel Alezan foncé ou "brûlé", qu'il me plaît d'appeler Choco, nous a captivés un moment à son retour de ballade.
"Pour parler à un cheval, il n’y a pas besoin de mots.
C’est une étreinte charnelle qui alimente nos rêves."
Bartabas **
Longuement, consciencieusement, sa cavalière lui massait les avants-bras. Tellement important de récupérer après l'effort ! De ses deux paumes, elle lui enserrait les muscles, puis ses pouces remontaient en cercles, pénétrant l'épaisseur du cuir, apaisant l'animal. Certainement cherchait-elle les points de tensions, les froissements de muscles ou les éventuelles petites foulures. Mais il sautait aux yeux qu'elle créait en même temps, avec Choco, un lien privilégié. Une relation où le donner et le recevoir sont intimement liés, où l'animal est pleinement considéré !
Et pour moi, simple spectatrice,
ce beau moment restera longtemps dans ma mémoire.
Comme je me souviens, parfaitement, de ce jour à Bois Mignon où, après le déjeuner, je demandais :
- Il est parti Pépé ?
- Oui, répondit Mémé Alice, il est en train de passer le harnais aux chevaux pour aller labourer dans un champ, après la Sablière.
J'étais curieuse; je voulais voir ce qu'était le harnais, comment les hommes le passaient aux chevaux. Mais en même temps j'étais peureuse. Les adultes ne disaient-ils pas qu'il fallait se méfier, ne jamais, au grand risque d'une ruade, rester à l'arrière des bêtes !
Pépé était parfois irascible : "C'est pas la place d'une gamine ici !" tonna-t-il, lorsque, le harnais à la main, il m'aperçut dans les parages.
* Inutile de préciser qui est la demoiselle qui court vers ses vingt mois !
** "Bartabas, roman" de Jérôme Garcin
Commentaires
Pour prolonger ta citation de Bartabas:
“Mon néant, pour un cheval.”
(André Velter)
Une belle sortie pour rendre visite à un animal fascinant et intelligent ! J’imagine aisément la petite demoiselle regardant, serrée contre sa maman, ce “monstre”. Je suis toujours en interrogation devant les pattes des chevaux surtout quand il s’agit de les dessiner. Bises et bonne semaine !
Je n’ai jamais connu de lien très fort avec un animal et je le regrette…mais j’imagine bien la petite se serrant contre sa maman, à la fois attirée et effrayée
Je reste étonné que l’homme ait fait du cheval un siège.
il y a quelques fois plus d’humanité dans le regard d’un cheval que dans celui de certains représentants de l’espèce sapiens.
Il ne te l’a pas dit mais Choco esquisse un pas de danse, pour remercier sa cavalière, et quand on danse, les pattes virevoltes…
jolie chronique tendre sur cet ami de l’homme. Merci pour le partage. Je t’embrasse Lily.
Mélange d’admiration et de crainte devant, et surtout derrière! ce bel animal capable d’aimer, de danser, travailler…
Ton billet me rappelle que j’ai toujours voulu lire le roman de Nicholas Evans “L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux”. (En passant, l’illusion optique dont tu parles - pour les pattes avant - je ne l’avais pas remarquée du tout avant de te lire. Ce qui semble confirmer l’idée que tant de choses - sont une question de perspective et de point de vue).
Ce sont des animaux magnifiques, de merveilleux compagnons.
J’adore cette photo!
Jolie petite Yaya qui avait besoin de l’ amour qui rassure…trop mignon..et tellement vrai..:-))
Je retrouve dans ton billet un épisode du film ” Japlou ” que j’ ai beaucoup aimé…Quand on aime , on doit échanger tant de choses ,
entre autre l’ attention qui est un petit moteur essentiel pour l’ osmose entre deux êtres …Comme j’ aime quand ce sont les animaux qui nous permettent l’ apprentissage de la vie…et cela à tous les âges..!!
Plein de bisous Lily